Fin novembre, Tribal Zine vous a proposé en exclu un premier essai du Kamel 221 2015 « Pro Race », le fleuron de cette nouvelle gamme aluminium lancée aujourd’hui par Monty. Une première prise en main par notre tribal rider Louis Grillon, qui nous a donné envie d’aller plus loin dans nos investigations. Nous l’emmenons à présent sur notre terrain de jeu préféré, les rochers de Buthiers, pour un « crash test » en bonne et due forme avec le reste de l’équipe. Cette nouvelle gamme, cela fait cinq longues années que les aficionados de la mythique marque espagnole l’attendait, et l’on a d’emblée pu leur dire qu’ils n’allaient pas être déçus. Ce bike, c’est clairement une bombe, avec un design hors norme directement inspiré du révolutionnaire M5. Un bike étonnant et surtout « détonnant » sur le terrain, qui nous a surpris par son explosivité sur les franchissements et son extrême légèreté (voir http://www.tribalzine.com/?Prise-en-main-du-Monty-Kamel-221)
Aujourd’hui, nous allons poursuivre un peu plus nos investigations et tout vous dire sur ce « missile sol-air », que nous avons testé dans ses deux versions « Klassic » (fourche et cintre alu / Magura HS 33) et « Pro Race » (fourche et cintre carbone / Hope Monty Pro Race). Des missiles qui nous ont directement été envoyés par l’usine espagnole de Sant Feliu de Llobregat, pilotés par son distributeur français historique, la Casa Monty de Jean et Alex Fabrégas.
Le Pro Race y est actuellement proposé à 2069€ et le Klassic à 1619€. A noter que ce 221 se décline aussi dans une 3ème version avec un frein à disque basique, le « Nordic » (1664€).
Avant de faire exploser la base de Loisirs de Buthiers, nous commençons une présentation complète de nos deux Kamel 221 2015, avec l’œil expérimenté de notre spécialiste maison Greg’ Soignon. Nous verrons que ce bike traduit parfaitement les nouvelles ambitions affirmées il y a quelques jours par la marque espagnole et son responsable technique/design Sergi Moyano. Il marque indéniablement un tournant pour Monty, mais ne rompt pas totalement avec son passé : pour résumer nos impressions, c’est un bike taillé pour le « riding UCI », avec un gros sabot de « Bike Trial » ! Photos : Antoine Prouteau.
Monty fait le grand saut !
Allez hop, on met ces deux Monty Kamel 221 2015 sur notre banc d’essai en grès pour une observation minutieuse, et ils produisent tout de suite leur effet... L’esthétique du bike est vraiment splendide, c’est un très beau vélo, aux lignes saillantes, racées, qui ne demande qu’à bondir sur les rochers. Nous sommes devant un vrai monopoutre en alu 6061 et la première chose qui nous interpelle est la finesse du cadre impressionnante vu du dessus,et ce sur toute sa longueur : on a pas l’impression d’avoir un monocoque entre les jambes !
La poutre principale va de la colonne de direction à l’axe arrière droit en intégrant le boîtier, et elle laisse passer la chaîne par une large ouverture. Le tube a une forme de losange pour conférer à l’ensemble une rigidité maximale, qui s’affirme complètement sur la partie avant. L’avant épouse largement la douille de direction, ce qui devrait être très intéressant sur les plantés. La rigidité est encore accrue dans la partie centrale par un large renfoncement triangulaire des deux côtés de la coque principale. La signature Monty (tant imitée) est toujours là : on retrouve la bosse caractéristique du « chameau » à l’avant, qui est là pour montrer que ce bike à la ligne futuriste ne rompt pas totalement avec le prestigieux passé de la marque. Les soudures sont très belles par rapport à ce que l’on a pu voir auparavant chez Monty, des angles atténués sur les pièces usinées, comme avec ces pattes arrières arrondies, montrent un vrai souci du détail et affinent encore la ligne du vélo.
La déco’ n’est pas trop chargée et des stickers racés mettent un peu plus en valeur la ligne du vélo.
Sur cette poutre est greffé un bras arrière façon moto, pour former la base/hauban côté gauche, qui est largement soudé à la coque principale et au boîtier de pédalier... C’est bien pensé, original, et c’est bien la première fois que l’on voit cela. Avec ce cadre d’un nouveau genre, Monty frappe assurément un grand coup, et renoue avec une longue tradition d’innovation. L’élan de la marque espagnole semblait s’être coupé, après le lancement d’un révolutionnaire M5. Elle fait aujourd’hui le grand saut que tout le monde attendait avec ce bike surprenant ! Nous admirons le beau travail fait au niveau du passage de gaine arrière, qui est complètement incrusté dans le cadre et qui est très soigné. Un bémol par contre pour le raccord entre la poutre et le bras, qui est légèrement biseauté sur le dessus, sur une dizaine de centimètres, alors que de l’autre côté on a un angle net : un point qui pourra être amélioré par la suite.
Quid du passage de chaîne, qui était un peu l’inconnue sur ce vélo ? Sur le modèle carbone, la chaîne avait une fâcheuse tendance à cogner le cadre et était un peu trop serré... Là, il est bien large, la chaîne ne pourra venir taper le cadre, d’autant plus que l’on a une ligne de chaîne parfaite. Voilà qui est une très bonne chose !
La tension de chaîne se fait par de classiques escargots, dont les crans vont se caler contre une vis. Une vis spécifique, sans tête, de type "pion", et sur ce point-là aussi – qui a son importance – nous sentons qu’il y a eu de la réflexion. Nous allons par contre remarquer un défaut de conception lors du montage de la roue arrière : l’entraxe des pattes est plus large que celle du moyeu, quelque chose qui n’est pas satisfaisant d’un point de vue mécanique pour le moyeu et la longévité de cette pièce... Quand on sert et que l’on met la vis en pression, elle aura tendance à mal travailler sur l’axe, pas l’idéal dans l’absolu. A corriger dans la prochaine version.
La douille de direction est une belle pièce, qui reçoit un jeu de direction de type semi-intégré pour rigidifier et alléger encore la partie avant du vélo. La partie basse, qui reçoit le roulement inférieur, est surdimensionnées et dans le prolongement naturel de la fourche, qu’elle soit carbone ou alu. Un bon point pour l’esthétique comme pour le pilotage. La douille est très largement ajourée, mais la finition laisse à désirer à ce niveau : l’ouverture est mal dégrossie avec de la bavure et une arrête franche, et c’est un peu dommage. Dommage aussi de voir le numéro de série du vélo gravé dans la masse sur le bas de la colonne (et celui de la fourche alu sur son pivot) : il n’est pas à sa place, et fait un peu tâche ici. On aime beaucoup les cales à crans qui permettent de régler la hauteur du poste de pilotage : un excellent principe, très astucieux, que l’on avait déjà vu sur le modèle antérieur.
La partie sabot, un peu oubliée...
Ce cadre marque assurément un sacré bond en avant pour Monty et c’est sur les plans technique & design l’une des nouveautés les plus intéressantes du moment ! Mais nous constatons que la partie boîtier / sabot est un peu oubliée, ce qui gâche quelque peu le modernisme de ce vélo.
On y trouve une superposition de pièces de renforts et de supports sabot qui "plombe" un peu l’ensemble ! Un premier et large gousset est placé devant le boîtier, et solidarise les deux pièces maîtresses du vélo. Par-dessus arrive un gros pont qui reçoit le tampon élastomère du sabot. Ces deux pièces massives sont suivies derrière le boîtier par un autre épais gousset qui fait office de yoke, et sur lequel s’appuient deux grosses pattes de fixation de sabot … Un enchevêtrement complexe et beaucoup de soudures, couplé avec un gros sabot « biketrial » d’un autre temps : c’est peu esthétique et peu opportun. Pourquoi ne pas adopter un sabot nouvelle génération plus ramassé (et aussi plus light) avec un système de fixation simplifié ? Et puis on a toujours le point de fixation avant du sabot situé sur le tube principal qui vient fragiliser le cadre... Percer un tube - aussi gros soit-il - pour fixer une pièce sur laquelle il peut y avoir de fortes contraintes n’est jamais une bonne chose. Peu opportun non plus le choix de la vis de fixation de sabot à ce niveau : inadaptée, avec sa grosse tête fraisée qui ne rentre pas dans le sabot ! Dommage qu’il n’y ait pas eu plus d’attention à ce niveau-là, on aurait pu faire là plus simple, plus esthétique et plus efficace, avec une pièce unique intégrant renforts et fixations. Là on a une juxtaposition de pièces mais aussi de soudures compliquées et l’on voit que malgré tous les efforts pour faire propre, ce n’est pas du tout esthétique. Autre chose de perfectible à ce niveau : le positionnement du boîtier de pédalier devra être revu, et être porté plus sur la gauche ; on voit que le boîtier est soudé trop à droite et on a une cale alu côté droit pour compenser ce mauvais positionnement et permettre d’avoir une ligne de chaîne parfaite... A corriger à l’avenir !
Des défauts qui ne viennent pas remettre en cause la qualité de ce cadre, et que font oublier un prix de vente particulièrement compétitif pour un produit qui a nécessité en amont un gros effort de développement et qui en aval s’avère terriblement efficace : 500€ le cadre nu, joli ! Qui du niveau d’équipement et poids de ces deux versions de série ?
Poids / équipement du « Pro Race » : perfection !
Honneur au « Pro Race », qui reçoit de série des freins à disque Hope Trial, une fourche et un cintre carbone pour un tarif avoisinant les 2000€ : là-aussi c’est une jolie performance au regard de la concurrence ! Mais la plus grosse surprise vient quand on l’accroche à notre balance : 7,67kgs pour un vélo de série, sacré performance ! Plus léger que bien des bikes préparés compétition avec freins sur jantes et titane à gogo : hallucinant, surtout pour un « full disc » ! Avec freins sur jantes, boîtier et pédales titane, et quelques autres aménagements, les plus fins metteurs au point pourront sans doute flirter avec la barre des 7kgs !
Le niveau d’équipement de cette version vise l’excellence, avec des composants « Pro Race » de grande qualité. A commencer bien sûr par cette fourche carbone qui est une pièce magnifique, et qui est quant à elle dotée d’une patte de frein à disque de type postmount. Elle reçoit un renfort alu pour prévenir tout risque de casse et il n’y a pas d’ouverture en bas du fourreau qui viendra se remplir de sable ou terre. Le frein Hope est comme tout le monde le sait un must et un modèle d’efficacité, et il arbore lui-aussi le label Monty Pro Race. Au niveau du poste de pilotage, un cintre carbone au galbe idéal couplé avec une potence dans l’ère du temps, avec serrage de fourche profilé en biais pour gagner quelques grammes. Comme souvent le serrage du cintre se fait par deux vis, ce qui n’est malheureusement pas la solution la plus pratique en cas de changement de cintre. Les poignées mousse sont agréables avec une bonne densité et une bonne épaisseur.
En ce qui concerne la transmission, pas de gros changement, les manivelles tout d’abord sont des 158mm forgées en aluminium 7075 T6 très légères, un bon produit qui n’a pas trop évolué niveau design. On appréciera sur le terrain les pédales simple cage qui procurent une large surface d’appui et donne une excellente assise, supérieure à bien d’autres modèles souvent trop petits et où l’on a le pied qui part à l’extérieur sur certains gestes. En ce qui concerne la chaîne, le choix s’est porté sur une KMC de type « cross » et « ultra-light », qui permet d’alléger encore la monture mais qu’il ne faudra pas oublier de changer régulièrement car sa durée de vie est forcément plus limitée qu’une chaîne « trial ». La roue libre est classique, à 9 cliquets et l’on aura quelques craquements sur un de nos modèles d’essai : pas plus fiable et pas moins fiable que les autres modèles du marché, c’est d’ailleurs un périphérique au fonctionnement toujours très aléatoire que l’on attend de voir évoluer.
Rien à redire sur les roues, on est vraiment sur quelque chose de très pointu et très léger : un montage Pro Race de grande qualité, à tous points de vues (moyeu, jante, rayonnage). Ah si, juste une chose un peu décevante sur un tel montage : des coquilles en acier d’un autre temps pour le serrage de roue, on aurait préféré des coquilles alu rouge plus en phase avec le reste de l’équipement ! Les pneumatiques sont les meilleurs et les plus prisés du moment : les excellents Pro Race sont comme tout le monde le sait les plus légers, offrent des qualités d’adhérence et de rebond exceptionnelles, et n’ont finalement qu’un seul défaut, celui de s’user rapidement.
Poids / équipement du « Klassic » : perfectible !
Passons à présent à la version « Klassic » de ce Kamel 221 2015, proposée aux alentours des 1600€. Sur la balance, il affiche presque un kilo de plus que la version supérieure : 8.54kgs. Dans la fourchette habituelle d’un bike de série haut de gamme, il peut même s’aligner sans rougir face à des concurrents d’un segment de prix supérieur...
Il reçoit des freins Magura HS 33, que l’on trouve aujourd’hui sur tous les bikes de série à frein sur jante, et qui font le job, sans pour autant offrir la fiabilité et l’efficacité d’autres alternatives. Ils sont équipés de leviers 4 doigts appréciables, avec au bout une boule façon levier de moto très "old school". Nous constatons un défaut au niveau de la fixation des étriers : pour pouvoir les monter correctement, il a fallu faire sauter le pontet de liaison entre les deux supports de fixation (visiblement cisaillé) afin de laisser passer la coquille de serrage. Le cordon de soudure n’est pas parfait à ce niveau et ce montage n’est pas satisfaisant sur le long terme. On note en pressant fortement le levier que cela bouge un peu au niveau du hauban, et un arceau ne sera peut-être pas du luxe pour les gros gabarits dans cette configuration de freinage.
Au niveau de la transmission, une grosse déception et à nos yeux une aberration en 2015 : un boîtier de pédalier à axe carré ! Cela existe encore ? Une antiquité que l’on avait pas vu depuis un bail, reléguée aux oubliettes par les Isis depuis longtemps, qu’il faudra penser à resserrer souvent. Les manivelles ont le même aspect que les Isis mais sont conçus dans un aluminium plus basique et sont légèrement plus déportées. Les pédales sont aussi beaucoup plus bas de gamme, avec une grosse cage elle-aussi très « old school » et des pièces intercalaires en alu entre cage et corps. On trouve une chaîne trial classique qui aura le mérite d’être un poil plus costaud.
Déception aussi au niveau des roues où l’on attendait mieux pour ce créneau de prix... Les jante aussi sont d’un autre temps : des jantes pleines, sans aucune ouverture, cela faisait longtemps que l’on avait pas vu ça ! Les roues sont montées avec des rayons standard de grosse section, qui n’ont rien à faire avec un moyeu light Monty dont le flasque est de petit diamètre. Les jantes sont légèrement usinées sur leurs flancs, mais ce ne sera certainement pas suffisant pour avoir un freinage correct.
Quid de la nouvelle fourche Monty ? Comme pour le cadre, un produit qui va de l’avant et marque une nouvelle avancée pour la marque espagnole ! C’est une pièce massive, impressionnante, avec une assise surdimensionnée et une très grosse épaisseur de pivot, avec une toute petite étoile à l’intérieur pour assurer le serrage. Cela laisse augurer une bonne rigidité frontale et semble clairement indestructible. Une belle avancée par rapport à la précédente fourche alu qui n’était pas un modèle de fiabilité : là, Monty a « bétonné » le sujet, et le SAV devrait être tranquille. Mais là-aussi il y a des petits détails qui mériteront d’être améliorés à l’avenir. A commencer bien sûr par ce pivot de fourche à la finition brute largement visible par le triangle d’ouverture de la colonne : au minimum, un petit sticker comme sur la fourche carbone, serait le bienvenue. Et puis, si l’on a une partie haute bien pensée avec une épaisseur maximale qui permet de parfaitement intégrer la fourche à la direction, la partie basse est par contre bien bien plus classique avec des pattes fines très « années 90 », où l’on voit même un perçage de fixation pour gabarit de montage.
Direction les rochers à présent pour tout vous dire sur le comportement de ce vélo... La suite par ici : Monty Kamel 221 2015, le missile sol-air. Mise à feu ! Ci-dessous, le descriptif de l’équipement de ces deux versions du Kamel 221 2015 et d’autres photos.








