Après un an et demi sans avoir participé à une épreuve UCI, Dani Comas a fait son grand retour sur la Coupe du Monde. Et de bien belle manière puisque l’on retrouve réuni le cercle des trois « Magnificos », qui dominent le trial 20 pouces mondial. Le pilote Jitsie / Monty montre qu’il est toujours dans la course sur ce type d’épreuves. Il monte sur le podium d’Heubach après une lutte serrée avec Abel et Benito.
Nous avons discuté durant près d’une heure avec Dani au lendemain de l’épreuve. Il nous parle de la manche dantesque d’Heubach. Nous étions impatients d’avoir son ressenti sur cette compétition. Le voici ! Interview : Alvaro Lopez / Photos : Jitsie, Marco Patrizi.
Tribal Interview
Salut Dani. Pour commencer, bravo : un an sans rouler en UCI et premier podium de la saison ! Comment as-tu vécu cette première manche de Coupe du Monde ?
Merci beaucoup. Je suis satisfait du résultat, surtout après plus d’un an et demi sans rouler en UCI. On sait tous que c’est difficile de concilier BIU et UCI, surtout en termes d’entraînement. Heureusement, j’ai la possibilité d’y participer et d’y participer sans pression, ce qui est important. Cette saison, c’est l’envie et la motivation qui me poussent, davantage que les résultats. Les sensations ont été très bonnes, notamment au cours de la demi-finale, que j’ai failli remporter, je suis vraiment trop content !
Tu es resté un bon moment sans te confronter aux top pilotes UCI et tu te retrouves en lice pour la victoire, d’entrée de jeu. Tu t’attendais à cela ?
Eh bien, à vrai dire, je ne pensais ni à une victoire, ni à un podium ou autre chose. J’y suis allé pour faire le mieux possible et je pense que j’ai réussi. J’ai eu de bonnes sensations, cela faisait longtemps. J’ai pris du plaisir. Je ne me suis pas focalisé sur le résultat pendant l’épreuve. Seul comptait le plaisir !
Beaucoup de pilotes nous ont dit que cette épreuve d’Heubach a été la pire de leur carrière, en termes de zones, de danger et d’organisation… Tu as roulé les deux jours : quelle est ton opinion ? Cela t’a-t-il posé problème pendant ces deux jours ?
Oui, cette saison, je dois passer par les quarts. En arrivant en finale, j’étais entamé physiquement mais c’est le règlement, après un an et demi sans courir en UCI.
C’est sûr que cela n’a pas été la meilleure des compétitions à laquelle j’ai participé. La saison passée il y a eu, d’après ce que l’on m’a dit, des épreuves de haut niveau. Cette manche d’Heubach n’en n’a pas été une. L’organisateur a manqué de réactivité, c’est indéniable. Par ailleurs, et c’est ce qui me révolte, c’est que les pilotes 20" sont, en quelque sorte, les cobayes : si on a du mal sur les zones ou que c’est trop dangereux, alors on les modifie pour les 26"… On est un peu mis à l’écart du spectacle, on mérite d’être traités d’égal à égal. A chaque Coupe du Monde à laquelle j’ai participé, c’est la même chose : les pilotes 20" passent en premier et on modifie les zones pour les 26" si besoin.
Les pilotes 20 pouces sont ceux qui se sont le plus plaints des horaires. Qu’en penses-tu ? Tu préfères une épreuve sur 2 ou 3 jours ? Et la Superfinale : tu penses que c’est une mauvaise chose de l’avoir supprimée ?
Je pense qu’une compétition sur trois jours est une bonne chose. C’est sûr que c’est un plus gros budget mais cela éviterait de se lever aux aurores, comme ce fut le cas. Je ne pense pas que cela soit très positif pour le sport si, à 8 heures du matin, on est en train de rouler les demi-finales… Il n’y a pas de public, tu dois te lever à 6 heures et les hôtels ne te proposent pas de petit-déjeuner à cette heure-là… Le système des trois jours est largement préférable. Pour ce qui est de la Super finale, je n’ai pas eu l’occasion d’en rouler mais sincèrement, j’aimerais qu’il n’y en ait pas. En plus, comme je dois passer par les quarts, cela me soulagerait… Je ne pense pas non plus qu’ils en retirent vraiment les avantages d’une retransmission télévisée. Sur certaines compétitions, comme celles que Kenny organise, d’accord, mais seulement pour le 26, puisque c’est le seul format qui est retransmis… Ce qui est bien avec l’UCI, c’est que la finale se fait en une heure et non en 6, comme en Biketrial.
Il y a eu également des plaintes concernant les commissaires…
Oui, il est clair que tu trouves injuste, parfois, de ne pas pouvoir porter réclamation. S’il y avait un peu plus de souplesse de la part des commissaires, tout le monde apprécierait. Mais tu sais que si tu prends un 5, ils ne vont pas te l’enlever : pour moi, c’est la meilleure des choses, pour éviter tout favoritisme.
Ce fut une épreuve sur laquelle on a vu que la présence des suiveurs était indispensable, aussi bien pour offrir une assurance comme pour donner des indications. Qu’en penses-tu ?
Sur ce point, le règlement doit être entièrement revu. Pour le spectacle, d’abord. Je suis d’accord que le suiveur n’ait pas le droit de parler au commissaire, mais je suis pour qu’il rentre sur la zone pour donner de la confiance au pilote. Notamment le dimanche, où cela manquait. Je crois que ce serait bon pour le spectacle : comme en trial moto, le suiveur fait partie intégrante du spectacle. Les zones sont trop silencieuses, cela manque d’ambiance. On a besoin de plus de show, cela mettrait de l’animation parmi le public. Les gens pensent qu’il faut être silencieux, pour ne pas troubler le pilote, alors que c’est totalement l’inverse. Il se créé une dynamique de silence et, finalement, cela ressemble à un enterrement. Je changerais cela, ainsi que la possibilité d’assurer des passages.
Le système de ponctuation a également fait l’objet de critiques. Dans son communiqué, Abel se plaignait d’être pénalisé de la même façon, que ce soit sur la première porte ou la dernière. Tu partages ce sentiment ?
Je ne trouve pas juste qu’un pilote qui se fait pointer un cinq soit au même niveau qu’un pilote qui va tout donner pour sortir la zone, en risquant de prendre un 5 sur la dernière zone. Je pense que les flèches et les portes doivent être passées. A Heubach, c’était un triste spectacle de voir les pilotes tenter de poser les pieds le plus possible. C’était davantage de l’escalade que du trial…
Comme tu le sais, Gilles s’est retiré pour protester contre l’organisation. Tu soutiens son geste ?
En premier lieu, je respecte le geste de Gilles à 100%. J’admire tout ce qu’il a fait au cours des années qui se sont écoulées. Mais je pense que, pour lui comme pour ses sponsors, ce n’est pas une bonne chose d’abandonner à trois zones seulement de la fin. Il aurait été préférable de le faire au début de la finale ou à la fin du premier tour. Je répète que ce n’est que mon opinion et que j’ai beaucoup de respect et d’admiration pour Gilles.
Est-ce que Dani a eu peur au cours de cette épreuve ?
Oui, surtout en ayant à l’esprit que je n’étais pas à mon meilleur niveau. J’ai pris du plaisir en quarts et en demis mais pas en finale. Il y avait vraiment des passages dangereux où tu te posais des questions… Des troncs mouillés avec des pneus chargés de boue, à 2 ou 3 mètres de haut…
Pour finir, on te met entre le marteau et l’enclume... Tu te sens capable de remporter une Coupe du Monde ou le Mondial ? Quel est ton favori pour ces deux compétitions ?
Je pense pouvoir remporter une manche de Coupe du Monde et je vais me battre pour être au Mondial. En favori, je vois Abel. Il est un ton au-dessus mais j’attends de voir Benito au cours de la saison.
Et le Championnat d’Europe ? Tu en étais le spécialiste.
Je ne pensais pas le courir mais puisque tu m’en parles, j’y serai. On se voit là-bas (rires).