Quelle ne fût pas notre surprise ce matin en découvrant dans l’interface privée du site (où chacun d’entre vous peut se créer un compte de rédacteur pour nous proposer vos infos, soit-dit au passage) un article d’un certain... Davy Hoyau ! Ce nom ne dira rien à la plupart d’entre vous, mais cela va être un choc psychologique pour les plus anciens. C’est un garçon qui a fait de bien belles choses pour nous autres trialistes il y a quelques années. Davy Hoyau, c’était « JT Man ». Celui qui était aux manettes du premier (le vrai) magazine 100% vtt et vélo-trial : le « Journal du Trial », que s’arrachaient tous les passionnés de ces premières années du vtt-trial français. JT Man est le père spirituel de Tribal Zine. Sans JT, point de TBZ. Hé oui, plusieurs membres du Tribal Staff comptaient en ce temps-là au nombre des abonnés de ce fanzine papier qui nous concoctait chaque mois avec amour et avec l’aide d’une amie photocopieuse Davy. En ce temps, point ou très peu d’internet, point de Tribalzine.com, point de Trial Mag’, point d’Espace Trial ou de Nopogo pour fédérer les riders... Juste le JT, et rien d’autre. En ce milieu des années 90, le JT était pour les trialistes français le seul moyen de suivre l’actualité du trial hexagonal (mais aussi mondial), d’avoir les résultats des compétitions, de faire connaissance avec les champions, de découvrir les nouveautés matos, et le JT Man nous faisait vivre tout cela avec talent et style. C’était bien sûr un rider, comme vous et moi. Un vrai passionné. Son JT, c’était vraiment quelque chose. On avait pas besoin de se faire prier pour renouveler l’abonnement, on anticipait, par peur de se retrouver déconnecté du trial. Il y en a des facteurs qui sont morts pour avoir oublié de mettre un JT dans une boîte aux lettres. On ne plaisantait pas avec le JT en ce temps-là. Et puis un jour cette belle aventure s’est arrêtée. Comme ça, d’un coup un seul. JT Man s’en est allé vers d’autres contrées et nous a tous abandonné. Silence radio dans le monde du trial. Plus de média trial. Il était partie faire de la radio justement disait-on, et œuvrait désormais dans les studios de Ouï FM. Sacré JT Man. Quelques années plus tard, on a décidé de reprendre le flambeau sur le net. Tribal Zine est né. Avec l’envie de redonner un média aux trialistes. Et puis voilà que ce matin, dans les articles proposés à la rédaction, on découvre cette Lettre aux trialistes, signée Davy Hoyau. 13 ans plus tard ah aah aaah ! Une lettre qui semble arrivée de la planète Mars, postée à l’adresse Tribal Zine ! Une lettre envoyée à la famille quoi... On ne vous cache pas que c’est un moment fort dans l’histoire de notre site, qui va secouer pas mal de monde dans le staff. JT Man fait son Come Back ! Il est passé par plusieurs planètes... La zik, le cinoche, et celle aussi des logiciels libres (dont Spip), sans laquelle aussi votre web trial n’aurait jamais existé. JT Man est de retour dans la planète Trial ! Les anciens vont sortir les mouchoirs. Pleurez, cela fait du bien il paraît... Snif... Mouchoir siouplait... Cela fait du bien de relire du JT Man. Cela nous avait manqué...
Lettre aux trialistes,
J’étais tranquillement en train de manger de cacahouètes devant la télé quand soudain un trialiste fit son apparition au milieu du zapping de la huitième chaîne. En général ils inondent le cerveau de commentaires stupides sous la vidéo qu’il ne faut surtout pas lire, mais d’autres fois ils mettent la référence de la source : « inspired.com ». Alors (d’abord je la repasse au ralenti, et) ni une ni deux je fonce sur le site pour voir la vidéo complète. Là je vois qu’elle passe la barre des deux millions de visionnages, mais surtout ce qui capte mon esprit est la géométrie du vélo du gars.
Il faut dire que j’ai abandonné le trial il y a au moins deux lustres (1 lustre = 5 ans !) et j’avais presque oublié que ce mot existait. Pourtant ça a été une part incroyable de ma vie, ça a été le fondement de ma pensée et de mon rapport à la réalité. Et c’était exactement l’argument qu’on donnait en tant qu’éducateurs, avant même de l’avoir expérimenté.
Ensuite j’ai navigué dans d’autres mondes (et c’est peu de le dire) comme la musique, le cinéma, les extra-terrestres (ne rigolez pas si vous ne voulez pas avoir l’air ridicules quand ils arriveront !) et bien sûr, le monde des logiciels libres, dans lequel j’officie aujourd’hui.
Dans chacun des monde il y a des spécialistes, des héros, une base de combattants, des puristes, des marginaux, des génies, et une certaine quantité de réfractaires à l’évolution.
C’est avec une foi ardente et une approche radicalement novatrice, comme dans tout ce qu’on doit faire, que j’aborde la programmation dans le but que ça rende service (et donc d’améliorer le monde !). On ne vit qu’une fois, il n’y a pas de réincarnation, pas de vie après la mort ou du moins pas la même vie et pas de chance de rattraper les erreurs qu’on a faites. C’est comme ça, tenez-le vous pour dit, et ça signifie qu’il faut en profiter à fond pour visiter tous les mondes qui sont à notre portée, ou au moins, dans le monde dans lequel on officie, qu’on s’y exerce en accord avec soi-même, en âme et conscience.
Je revois cette époque de trial avec une certaine humilité face aux progrès qui ont été faits, j’ai vraiment l’impression d’être projeté dans un futur où tout à changé.
En voyant les nouvelles géométries, je me souviens des critiques que je recevais pour oser rouler sur un cadre « 12 pouces » alors qu’aucun n’avait moins de « 15 pouces ». J’avais retiré les deux plateaux, le dérailleur avant, laissé deux pignons à l’arrière (un de 24 et un de 13), j’avais scié la base pour raccourcir l’empattement et mis des rondelles parce que l’attache rapide passait au travers, viré dix maillons de la chaîne, coupé la tige de selle, passé les jantes à la disqueuse et adopté des pneus de large diamètre bas de gamme, contre toutes les recommandations de mes frères !
J’avais même cherché à obtenir des roues de 24 pouces sans succès, alors j’avais dessiné les plans de mon vélo trial de rêve, puis la vie m’a téléporté brutalement ailleurs.
Et me revoilà dix ou douze ans après, observant avec émotion les progrès accomplis tant en terme de matériel qu’en terme de technique. A l’époque on ne tapait même pas la roue avant sur la marche, ça n’existait pas ! En voyant ça j’ai immédiatement eu envie d’essayer !
Et il semble que des routines perdues se sont réveillées, puisque maintenant je lorgne sur l’achat d’une bête de trial de luxe, alors qu’à l’époque où je n’avais pas un rond en poche je devais tout fabriquer moi-même ou négocier en échange de publicité dans mon fanzine.
Le Journal du Trial a été ma première approche systémique d’un groupe social, (puis-je dire avec le vocabulaire d’aujourd’hui), mon premier instinct a été de regrouper tous ces gens éparpillés avec un périodique qui annonçait les dates des compétitions et qui les relataient, avec des interviews faits à l’arrache et un appareil photo argentique ! Et Hop, vélo dans le RER, pas de ticket, et en avant la jeunesse !
La cohésion me semblait importante, et j’avais le désir de voir les trialistes se rencontrer, et c’est ce qu’on a fait pendant de nombreuses années, en mode urbain-parisien et parfois en compagnie de freestylers (qui avaient du mal avec le trial !).
Alors, tout ça m’est revenu subitement après la vidéo magistrale de Inspired (je ne connais pas le nom du gars mais ça a l’air d’être un bon gars !).
Je me suis souvenu qu’à 17 ans je rencontrais Marc Vinco alors âgé de 14, en croyant avoir inventé quelque chose en étant capable de monter les escaliers par petits rebonds, et qui était venu faire une démonstration à Tignes avec les frères Janin et quelques autres. C’est seulement après qu’on le voyait avec son « Alpinestars » à bases hautes ! Avec sa voix douce il m’avait donné quelques conseils et suite à cela, je l’avais revu autant de fois qu’il m’était possible années après années.
J’ai alors cherché des informations sur lui, qu’est-il devenu ? Quelle émotion d’aller chercher ça, et de filtrer toutes les pages, et ça me permet en passant de faire un état des lieux sur le trial. J’ai aussi cherché sur Thierry Girard, avec qui la discussion pouvait vite devenir philosophique (et d’un bon niveau en plus !), dont je me souviens qu’il s’était promis, en riant à moitié, qu’après quarante ans il deviendrait « rentier » !
Alors le premier a tourné deux ans avec le Cirque du Soleil, cela était remonté à mes oreilles et je ne m’en souvenais plus, et ça m’est apparu comme une excellente chose. Son style, sa présence et sa créativité on sûrement dû être encouragés, et Marco ce que je te souhaite si tu lis ceci, c’est de développer ton talent artistique, de te renouveler continuellement, de faire la surprise. C’est vraiment rare les gens qui ont une âme aussi pure, quand je vois à quels politiciens nous avons à faire et comment ce monde est mené, et leur noirceur, ça tranche de voir des gens comme toi !
En voyant une démo en vidéo, j’ai compris un truc. Par exemple je me souviens qu’un jour je m’amusais à la Défense sur les dalles de pierre qui étaient en travaux, et qu’en relevant la tête, vers midi à l’heure où les gars cherchent une once d’air frais pour se dépolluer la tête, il y avait (j’ai compté brièvement) au moins deux cent personnes qui s’étaient assemblées autour. Et quand je les ai vues, le public s’est mit à applaudir de façon chaleureuse et prononcée. C’était vraiment énorme.
Eh bien ce que je veux dire, c’est que le trial c’est de la magie. Par les faits, et non par des discours oisifs, on raconte une histoire, on propose une difficulté, un problème, et on le résout. C’est comme une pièce de théâtre, avec de l’aventure et du suspense. En faisant ça, - ce n’était pas un show programmé où on ne fait que ce qu’on sait faire avec négligence, c’était un entraînement où je me croyais seul et où je cherchais à battre mes records - en donnant ce spectacle, on va chercher profondément dans l’âme des gens les problèmes qui sont les leurs, leurs peurs, leurs limites, leur inexploré, et on lui envoie l’éclairage qui est celui de la maîtrise et de la foi. C’est là que prend racine l’extraordinaire, c’est comme ça qu’on avance. Il faudrait être aberrant dans sa tête pour ne pas croire que ces exploits ont une influence positive sur le monde.
C’est pour cela que je suis content d’avoir vu Marc happé par l’école des gens de la route, où l’artistique transcende la réalité. Cela promet un destin extraordinaire (pour lequel son père, Séraphin que je salue, s’est dévoué corps et âme), mais surtout cela m’a fait voir ceci :
La fameuse vidéo de Inspired, me semble marquer une étape importante dans le développement du trial. J’ai de nombreux arguments qui peuvent me faire dire cela (je ne vais pas m’étendre). Le trialiste ne véhicule pas seulement du rêve et de la magie, mais aussi un message qui est fondamental et qui commence à pouvoir être entendu. Ça dit en gros, « Vois ce que tu peux faire ». Tout cela est de l’ordre du symbolique, mais c’est surtout une vérité profonde et même vitale.
On vit à une époque où plein de choses atteignent leurs limites, et comme souvent dans c’est cas-là il y a deux comportements parfaitement humains mais opposés, ceux qui paniquent et se rétractent et ceux qui font un effort sur eux-même, un peu comme dans un moment de folie, et malgré qu’on ne sache pas trop où ça mène, et avec toutes les prises de risque que ça comporte.
Et c’est ce chemin qui est « tiers-exclus », auquel personne ne croit, qui est le bon !
Davy
PS 1 : Je dédie ce coup de boost à Vincent Guibert, que j’aurais sorti de l’enfer de la drogue sans faire exprès en lui transmettant le virus du trial, et qui est mort en moto, c’est à dire au volant de sa passion.
PS 2 : J’ai trouvé ce lien qui est très drôle... Journal de Trial !
La couv’ du JT N°24... Thibaut Marriaux, l’actuel boss de TMS-Bikevision, sur un Monty ! Au programme de ce numéro paru en janvier 1996 : une présentation d’un vélo-trial Muddy Fox 20", une interview de Thierry Girard, des compte-rendus d’indoor à Soual, Mazamet et Saint-Gaudens, des tas de news et un bel article sur les fédérations trial FFC et Bike.
La couv’ du JT N°26... Le futur Champion du Monde Bruno Arnold, qui fondera bien plus tard Ozonys, sur un Specialized ! Au sommaire de ce zine paru en mars 1996, un retour sur l’indoor de Souppes-sur-Loing, justement remporté par Bruno Arnold et des interview d’Ot Pi, Pédro Pi et Jordi Rubio.
La couv’ du JT N°27... Le futur Champion du Monde et talentueux showman Marc Vinco sur les zones de l’indoor de Bercy ! Ce numéro d’avril revenait d’ailleurs en détails sur cette compétition, nous proposait aussi un zoom sur le matos des champions, nous donnait une bidouille pour alléger son vélo et donnait aussi la parole à un certain Joël Gavillet, qui nous présentait le trial suisse.
Une dernière pour la route...La couv’ du JT N°30... Le Champion du Monde Thierry Girard qui faisait le show sur le Tour de France ! Davy nous avait d’ailleurs proposé dans ce numéro de juillet 1996 un retour sur ce show survolté, assuré par Thierry Girard et Marc Vinco, avant de revenir sur la manche d’ouverture de la Coupe de France, et bien sûr de nous balancer toutes les bonnes news du moment !
Un magnifique cliché publié dans ce trentième numéro... Marc Vinco sur un énorme deux-coups. Il roulait alors pour MBK, sur un Monty relooké...